A «Formidable» Hype in Brussels
L’aube. Le jour se lève timidement sur Bruxelles. Paul Van Haver, alias Stromae, débraillé, pitoyable et «un peu fort bourré» titube sur les rails du tram au cœur d’un petit matin pluvieux. Le dandy a visiblement passé une très mauvaise soirée et picolé toute la nuit. Les vidéos amateurs filtrent sur YouTube. Les commentaires pleuvent. Les critiques fusent: Stromae serait passé du côté obscur de la peopolisation. From the Norient book Seismographic Sounds (see and order here).
Tout faux. Trois jours plus tard, il donne sa réponse avec un clip: une caméra cachée. En effet, les déambulations alcoolisées de Stromae n’étaient qu’une mise en scène avec, en guise d’épilogue, le clin d’œil final d’un artiste à jeun et lucide du pouvoir du buzz en 2013.
Ce choix n’est pas innocent. Filmé de manière traditionnelle, cette histoire de mec fraîchement largué par sa petite amie n’aurait été qu’un clip anodin, une histoire de rupture comme tant d’autres. En optant pour cette méthode de mise en scène, Jérôme Guiot, le réalisateur, dépasse le banal mélodrame. Avec ce clip, il offre une vraie réflexion sur la tyrannie du buzz. En captant des badauds qui préfèrent filmer plutôt que tendre la main, il montre des anonymes qui, par la toute puissance des clics et des «like», ont le pouvoir de salir leurs idoles d’hier.
Stromae respire la «brélitude»
A écouter «Formidable», on croirait entendre Jacques Brel revisité par l’électro, les sons cubains et la rumba congolaise. Sensation renforcée lorsque l’on visionne le clip: de par son phrasé, ses mimiques et son incroyable expression corporelle rappelant le «non Jef t’es pas tout seul» du Grand Jacques – comme le chansonnier est appelé en France et en Belgique –, Stromae respire la «brélitude», et par la même occasion transpire sa «belgitude». Stromae est belge, du bout de ses mocassins jusqu’à l'extrémité de son nœud papillon: accent rocailleux, mélange de tragique et de légèreté, culture de l’absurdisme et d’un fatalisme joyeux, sans oublier ce zeste d’autodérision permanent servant à décanter l’amertume tenace.
Ce clip a été stratégiquement tourné sur le goulet Louise, véritable carrefour séparant le haut et le bas de la ville de Bruxelles, combinant arrêt de tram, rond-point constamment embouteillé et se trouvant à proximité d’un commissariat et du Palais de justice. De quoi allier du dynamisme visuel à un maximum de possibilités d’interactions décevantes (les passants filmant un Stromae ivre) ou cocasses (la discussion avec les policiers).
La confrontation avec l'ordre locales
Il est d’ailleurs intéressant de s’attarder un peu plus sur la séquence confrontant le chanteur aux forces de l’ordre locales. Ce qui pourrait n’être qu’un détail résume pourtant parfaitement cette mentalité «bonhomme» typiquement belge. Là où dans d’autres contrées la maréchaussée aurait fait preuve de moins de philosophie, les flics made in Bruxelles se montrent familiers et débonnaires. Sans tomber dans les généralités réductrices, cette approche éminemment bienveillante, démontre que les Belges, dans leur grande majorité, qu’ils soient de simples pékins ou qu’ils portent l’uniforme, préfèreront toujours le dialogue à la sanction, la souplesse à la rigueur.
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Published on May 13, 2017
Last updated on April 10, 2024
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